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30 avril 2010 5 30 /04 /avril /2010 11:25

 

http://actualite.portail.free.fr/france/06-03-2010/nicolas-sarkozy-annonce-un-complement-d-aides-aux-agriculteurs/OFRTP-FRANCE-AGRICULTURE-SARKOZY-AIDES-20100306.jpgQUESTION - Vous avez choisi de vous exprimer sur l'agriculture à un moment particulier puisqu'une grande manifestation a eu lieu à Paris cette semaine. Comment interprétez--vous ce désarroi et que peut faire l'Etat pour rassurer les agriculteurs ?

LE PRESIDENT - D'abord, ce n'est pas de parler de l'agriculture qui compte. Je vois beaucoup de gens qui parlent depuis longtemps d'agriculture. Ce qui compte c'est d'agir. Les agriculteurs n'ont pas besoin qu'on leur tienne des discours sur le fait qu'ils sont le sel de la terre, l'identité de la France et qu'ils ont droit à toute l'affection et tout l'amour des uns et des autres. Il faut prendre des décisions. C'est un secteur prioritaire de l'économie française. L'Europe est la deuxième puissance et à l'intérieur de l'Europe, la France est la première puissance agricole. C'est donc stratégique pour l'économie française, pour l'indépendance de la France et la sécurité alimentaire de nos compatriotes. L'agriculture, en matière économique, c'est aussi important que le spatial, que l'aéronautique ou que l'industrie.

QUESTION - Le plan de soutien, qui a été étoffé récemment, repose sur des prêts alors que nombre d'agriculteurs sont déjà trop endettés ; envisagez-vous d'autres mesures ?

LE PRESIDENT - L'agriculture connaît une crise comme elle n'en a jamais connu jusqu'à présent car cette crise touche en même temps toutes les productions et toutes les régions. 
Le gouvernement a mis en œuvre un plan qui a été dépassé par son succès puisque nous avions prévu d'engager 1 milliard d'euros de prêts bancaires, et que nous avons atteint 1,8 milliard d'euros. Il a été consommé en 5 mois ce qui prouve qu'il était adapté. Mais ce plan vise à répondre à une crise conjoncturelle, il ne suffira pas à répondre aux défis structurels et c'est dans cette optique que je dois me placer. L'époque où les ministres de l'agriculture distribuaient des subventions, que les agriculteurs étaient obligés de rembourser dix ans après, est une époque définitivement révolue. Quand Monsieur Glavany accordait des subventions, que nous sommes obligés de faire rembourser aux agriculteurs, ce n'était pas responsable, pas acceptable. Nous, nous allons plus loin, de façon structurelle, en particulier dans le cadre de la loi de modernisation présentée par Bruno Le Maire au mois de mai. Nous allons augmenter les possibilités pour les agriculteurs de réduire leur impôt sur le revenu les bonnes années, en leur permettant de déduire une fraction de leurs cotisations sociales dues à la MSA pour l'année suivante, ce qui permet de lisser les revenus. Les bonnes années ils pourront déduire de leurs bénéfices une avance sur leurs cotisations sociales à venir, qu'ils paieront à la MSA et, les mauvaises années, ils ne seront pas conduits à enregistrer à la fois une baisse des revenus et le paiement des cotisations. C'est une mesure qui va plus loin que la dotation pour investissement et la dotation pour aléas. En vérité, l'ensemble de ces dispositifs permettent aux agriculteurs d'échapper largement à la progressivité de l'impôt sur le revenu, ce qui est naturel puisque leurs revenus sont très irréguliers.

QUESTION - Sur les prix et le partage de la valeur ajoutée que comptez-vous faire ?

LE PRESIDENT - Je suis préoccupé par la question du partage de la valeur ajoutée. J'ai toujours pensé que les agriculteurs étaient des entrepreneurs qui ne voulaient pas vivre d'assistanat mais d'un prix qui rémunère leur savoir-faire. La question du partage de la valeur ajoutée est capitale. Je réunirai le 17 mai à l'Elysée les distributeurs, les agriculteurs et l'industrie agroalimentaire ; les distributeurs devront signer avant l'été un accord de modération de marges sur la vente de fruits et légumes en magasin lorsque les prix des fruits et légumes payés aux producteurs sont en crise. Ceci afin que le producteur ne soit pas pénalisé par des prix trop bas et les consommateurs ne soient pas pénalisés par une hausse des prix. Nous allons jouer sur les accords de modération de marges et les distributeurs qui n'accepteront pas la modération des marges seront taxés. C'est une mesure structurelle forte.

QUESTION - La perte de compétitivité des agriculteurs et des filières agro-alimentaires devient alarmante comment comptez-vous la relancer ?

LE PRESIDENT - Pour soutenir la compétitivité de nos agriculteurs, je vous annonce quelque chose qui est demandé depuis très longtemps : c'est l'utilisation des camions de 44 tonnes dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire dès l'été prochain. Cela aura un double effet : réduire les émissions des gaz effet de serre et, tenez-vous bien, apporter un gain de productivité de 11 % sur le prix des matières premières agricoles. C'est 80 millions d'euros par an pour ces filières. Nos partenaires européens peuvent déjà le faire, et il était important de donner satisfaction sur ce point. Je reviens aussi pour mémoire sur l'exonération totale des cotisations patronales dues à la MSA, pour les travailleurs saisonniers. Le coût du travail est maintenant de 9,29 euros à l'heure ; cela ne nous met pas tout à fait au niveau des allemands mais ça représente une avancée considérable. Vous voyez bien la logique : l'étalement des cotisations sur les bonnes années par rapport aux mauvaises répond à une logique d'entreprise et reconnaît le statut d'entrepreneur aux agriculteurs. Et l'introduction des camions de 44 tonnes c'est du gain de productivité ; les accords de modération de marges, c'est pour les prix parce que j'ai toujours pensé que la clé pour l'agriculture ce sont les prix et la compétitivité, bien au-delà des subventions et des prêts bonifiés.

QUESTION - Vous avez rencontré dans l'Essonne des producteurs de céréales ; le délai que vous leur avez donné pour faire le point de la situation lors d'un comité de suivi à la fin de l'année est jugé bien long. Qu'en pensez-vous ?

LE PRESIDENT - Je comprends le désarroi des céréaliers. Je le comprends parce que, grosso modo, dans le bilan de santé de la Pac, nous avons réorienté 1 milliard d'euros d'aides, pour mieux soutenir les éleveurs. Pourquoi ? Parce que pour défendre la Pac il faut qu'elle soit juste. Or il se trouve que les céréaliers en 2007 et en 2008 ont eu de très bonnes années : en 2007, c'était plus 100% de revenu pour les céréaliers. Aujourd'hui ils subissent, en moyenne, 80 euros de moins à l'ha de subventions. Qu'ils ne soient pas contents je peux le comprendre et comprendre aussi que cela crée de grandes tensions au sein du syndicalisme agricole. Mais peut-on contester l'idée que les éleveurs des zones de montagne étaient dans une situation plus grave que les céréaliers? Manque de chance, la première année d'application du bilan de santé de la Pac, le prix des céréales s'est effondré. Je comprends les difficultés des céréaliers, nous allons les aider. Ceux des agriculteurs dont l'impôt est calculé sur une moyenne de 3 ans bénéficieront, en 2010, d'une année supplémentaire pour le payer. C'est une mesure qui devrait être particulièrement intéressante pour les céréaliers.

QUESTION - Vous parlez d'agriculteur-entrepreneur. La loi de modernisation met l'accent sur les dispositifs d'assurance : assurance récolte et assurance revenu. L'Etat est-il prêt à jouer son rôle de réassureur à l'avenir ?

LE PRESIDENT - La vérité c'est que sur les 30 dernières années, l'Etat a été l'assureur de la profession, lorsqu'il y a eu dégradation des revenus. Aujourd'hui, l'Etat soutient l'assurance récolte par une enveloppe de plus de 100 millions d'euros par an et propose 1,8 milliards d'euros de prêts bonifiés pour prendre en charge la trésorerie. N'est-ce pas de l'assurance ? L'agriculture est soumise à des aléas. A des aléas climatiques et des aléas de marchés. Les marchés sont gangrenés par la spéculation et face à ces aléas la réponse assurancielle est la bonne réponse. Comme on s'assure pour les calamités on doit pouvoir s'assurer contre des dégradations brutales de prix.

QUESTION - Pour l'agriculteur de demain qui veut vivre de prix, il faut moins d'Etat ou plus d'Etat d'après vous?

LE PRESIDENT - Il faut plus de régulation. Et il faut de la contractualisation. Les agriculteurs ne peuvent pas être en bagarre permanente avec leurs clients. La contractualisation ça veut dire une meilleure organisation de l'offre, je pense à certains secteurs comme les fruits et les légumes dans lesquels les producteurs doivent se rassembler pour peser face à la distribution. Et là, la présence de l'Etat est clairement aux côtés des agriculteurs pour les aider dans leur bras de fer.

QUESTION - Même si ça peut coûter un peu plus cher aux consommateurs ?

LE PRESIDENT - Je vous ai dit le contraire en vous parlant de l'accord sur les modérations de marges. Il ne faut pas avoir honte du soutien de l'Etat. L'Etat ne soutient-il pas la production aéronautique française, avec les avances remboursables ? Croyez vous que la filière nucléaire française existerait sans l'Etat ? EDF, Areva, ou GDF-Suez sont, soit totalement à capitaux publics, soit à majorité de capitaux publics. Où en serait le développement de la voiture électrique si l'Etat n'avait pas lancé un plan en sa faveur ? Et la vente de voitures où en serait-elle s'il n'y avait pas eu la prime à la casse ? Et la production de voitures où en serait-elle si il n'y avait pas eu le bonus malus qui, entre parenthèses, a coûté plus cher que prévu du fait que l'on a distribué beaucoup plus de bonus que de malus ? Pourquoi culpabiliser les agriculteurs en la matière ? 
Bien sûr la contractualisation et l'assurance ne suffisent pas ; il faut poser clairement la question de la régulation agricole.

QUESTION - Que mettez-vous derrière le mot « régulation » ?

LE PRESIDENT - On n'est pas obligé de passer d'une économie de surproduction totale à une économie qui ne produit pas assez, où la spéculation joue un rôle considérable et où un milliard d'habitants dans le monde meurent de faim. La question de la régulation est posée au niveau européen comme au niveau mondial. Je la poserai à l'Europe comme je la poserai dans le cadre du G20. Je n'accepte pas l'idée que sur certaines matières premières agricoles, la spéculation empoche des sommes invraisemblables. On peut acheter 5 % d'une production, la revendre avant de l'avoir payée ; tout ceci se passe entre une dizaine d'intermédiaires qui spolient les producteurs agricoles du monde entier sans que les consommateurs n'y trouvent un avantage. Clairement je dis : créons une organisation mondiale de l'agriculture pour mettre de la transparence et de l'organisation sur le marché. Il y a un problème de gouvernance mondiale de la production agricole et je ne parle pas seulement des agriculteurs européens. Les agriculteurs indiens, les agriculteurs brésiliens, les agriculteurs turcs ont autant besoin que leurs collègues européens, d'une visibilité sur leurs prix. Qui oserait dire que le cacao, le café ou les céréales sont des marchés fluides, définis par l'offre ou la demande ? 
Le mot stock n'est pas un gros mot, dès lors que les stocks sont bien utilisés pour réguler les productions et je m'opposerai formellement au nom de la France au démantèlement des instruments de régulation des marchés en Europe.

QUESTION - La loi de modernisation de l'agriculture vise à inciter les agriculteurs à se regrouper. Êtes-vous prêt à assouplir ou demander l'assouplissement des règles de concurrence pour que ces regroupements ne soient pas sanctionnés par le droit ?

LE PRESIDENT - Je vais vous répondre en vous disant trois choses : la première c'est qu'il faut des prix de référence qui permettent une rémunération décente des productions. Je conteste aussi l'idée qu'un producteur de lait livre sa production sans même savoir le prix auquel il va être payé. D'où mon idée de développer la contractualisation. Il faut clairement changer les règles de concurrence. Je m'en expliquerai avec le président Barroso comme avec le commissaire à l'agriculture que je dois recevoir prochainement. Enfin, il faudra certainement, dans le cadre d'un plan de développement de certaines filières, dont celle du secteur laitier, encourager les productions à plus forte valeur ajoutée. Il vaut mieux produire des fromages que de la poudre de lait qui se retrouve en concurrence avec les marchés mondiaux.

QUESTION - Vous voulez donner beaucoup d'importance aux interprofessions. Sont-elles satisfaisantes dans leurs organisations actuelles ? Faut-il en élargir les membres aux syndicats agricoles minoritaires ?

LE PRESIDENT - L'agriculture française a bénéficié depuis quarante ans d'une organisation syndicale modérée et responsable. Cela lui a permis d'avoir une politique agricole commune conduisant l'Europe à devenir la deuxième agriculture du monde, au sein de laquelle la France est la première nation agricole. Je dis au monde agricole : vous n'avez rien à espérer de la division. Je ferai tout pour favoriser le dialogue avec les organisations les plus responsables à un moment où il y a des tentations démagogiques et populistes exacerbées par la crise. Pour autant, je parle avec tout le monde ! J'ai envoyé des signaux, au monde agricole. Quand l'État prend une participation de 150 millions dans Limagrain, c'est le choix de la confiance dans l'avenir qui s'exprime. Quand l'État s'investit totalement dans le dossier Entremont, il montre là aussi sa confiance dans l'avenir. Pour tous ces dossiers, pour définir l'avenir de nos filières, il nous faut discuter avec une profession unie. Le combat, pour sauver la politique agricole commune, pour exiger la préférence communautaire, pour garantir des prix, toutes choses dont la France porte le discours, pourra-t-on la mener avec une profession divisée ? Je discute avec tout le monde même si je me suis toujours bien porté d'entretenir avec la FNSEA des rapports confiants.

QUESTION - Les rapports sont souvent passionnels entre le syndicalisme majoritaire et le président de la république. C'est une bonne chose ou non ?

LE PRESIDENT - Je n'aime pas le mélange des genres. J'ai un travail à faire. Je crois dans l'avenir de l'agriculture française et européenne qui va bien au-delà des rapports personnels qui peuvent être les miens avec le président de la FNSEA quel qu'il soit. Je ne pense pas que, parce que je serais à tu et à toi avec un dirigeant, ou que j'aurais passé des heures au salon de l'agriculture, cela donnera plus d'espoir aux agriculteurs. Je crois au travail qu'on fera ensemble et je travaillerai avec les dirigeants agricoles quels qu'ils soient même si je vous ai dit tout le bien que je pense de l'organisation majoritaire.

QUESTION - Il y a deux époques dans les relations entre Nicolas Sarkozy et les agriculteurs. La première est celle de l'accent mis sur les efforts écologiques et sociétaux ; la deuxième, qu'on pourrait dater des élections régionales, est celle où ces efforts sont très relativisés, comme mis au second plan. Qu'est-ce qui a changé ?

LE PRESIDENT - C'est au salon de l'agriculture, et non après les élections régionales que j'ai voulu répondre aux soucis des agriculteurs. A partir du moment où vous avez une profession dont les plus chanceux ont perdu 35 % de leur revenu et les moins favorisés plus de 50 %, j'ai considéré que ce n'était pas la période pour leur imposer la moindre règle supplémentaire. Est-ce déraisonnable de parler ainsi ? Sinon, c'était les faire couler. Deuxième remarque : je continue à penser que le Grenelle de l'environnement a d'abord été fait pour les agriculteurs. Les premières victimes de l'abus de pesticides ce sont ceux qui vivent de la production agricole. Donc opposer les agriculteurs et le Grenelle de l'environnement n'a aucun sens. J'ai aussi voulu dire par là qu'il y avait un moment où il fallait enlever de la pression aux agriculteurs. Je n'ai pas l'intention non plus de mettre la compétitivité de l'agriculture française en danger, face à des concurrents qui n'ont pas les mêmes règles. Je suis préoccupé quand je vois le déficit de compétitivité avec l'Allemagne pour les fruits et légumes et les produits saisonniers, quand je vois l'utilisation qu'ils font des travailleurs immigrés, en regard des conditions sociales en France. J'ai dit également qu'il n'était pas question d'imposer une taxe carbone aux agriculteurs tant qu'il n'y aurait pas une taxe carbone aux frontières de l'Europe.

QUESTION - Vous avez dit «préférer une crise plutôt qu'une remise en cause de la Pac» : à partir de quand estimerez-vous qu'il y a remise en cause de la Pac ?

LE PRESIDENT - J'ai été extrêmement choqué de voir que dans le premier projet de la stratégie de l'Union européenne pour 2020 présentée par la Commission, il n'y avait pas un mot sur l'agriculture. J'ai indiqué au président Barroso que, si cela ne changeait pas, la France quitterait la table de discussion. Cela a changé. Mais cela ne suffit pas. La Commission est en charge d'appliquer la politique européenne. La première politique européenne commune c'est la politique agricole. La Commission devrait en être fière plutôt que de s'en excuser. Parler des atouts de l'Europe à l'horizon 2020 en omettant l'agriculture, c'est quelque chose que je ne pouvais pas accepter. C'était trop révélateur d'un raisonnement technocratique qui ne correspond pas à ce qu'ont voulu et fait les pères fondateurs de l'Europe. 
Il n'est pas normal de parler de la lutte contre la pauvreté, de la formation et de l'éducation qui ne font pas partie des compétences européennes et de ne rien dire de l'agriculture qui en fait partie. Je n'accepterai pas le démantèlement des moyens de régulation, qui nous ont permis d'éviter une grave crise du lait. Enfin, il ne serait pas prudent d'abandonner la politique agricole commune qui est l'élément clé de la sécurité alimentaire des consommateurs, après toutes les crises que nous avons connues et notamment celle de la vache folle. On a vu ce que cela pouvait produire. C'est le rôle de l'Europe de protéger la sécurité alimentaire de ses citoyens. Je n'accepterai pas non plus qu'on s'aligne sur des prix mondiaux alors que les Américains soutiennent matin, midi et soir leur agriculture. Et ils ont bien raison de le faire. Je ne vois pas pourquoi l'Europe ne ferait pas la même chose.

QUESTION - Sur le plan budgétaire, les négociations vont commencer alors que nous serons bientôt contributeurs nets...

LE PRESIDENT - Mais nous le sommes déjà ! Nous payons quatre milliards et demi en solde net à l'Europe. Nous n'allons pas prendre de leçons sur ce plan alors qu'il y a le chèque britannique ! 
On ne peut pas réduire les subventions sans restaurer la préférence communautaire et des prix dignes de ce nom qui couvrent les coûts de production des agriculteurs européens. Je ne céderai pas.

QUESTION - Vous êtes optimiste sur ce dossier ? Vous placez la barre très haut. Pourra-t-on obtenir ne serait-ce qu'une part de ce que vous demandez ?

LE PRESIDENT - Y a-t-il un autre choix possible ? De laisser défiler la pelote jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien?

QUESTION - Ce serait le choix d'une restructuration plus forte du monde agricole...

LE PRESIDENT - Il faut évidemment restructurer notre appareil de production. Mais dans le cadre de plans de développement concertés. Je ne dis pas aux autres : « bougez, nous, on ne bouge pas». Mais je ne laisserai pas détruire l'agriculture française. C'est ma mission. Mon ambition est de ne pas laisser faire pour l'agriculture ce que l'on a laissé faire pour la finance.

QUESTION - Quel argument pouvez-vous présenter à la Grande Bretagne pour qu'ils se rapprochent de nos positions ?

LE PRESIDENT - C'est simple, il y en a deux : d'abord, êtes vous intéressés par la sécurité alimentaire ? La crise de la vache folle qui a fait des ravages, les Britanniques ne l'ont pas oubliée. Or, le seul moyen de garantir la sécurité alimentaire c'est d'avoir une politique agricole commune. Deuxième argument, le budget : si vous trouvez que le budget est trop élevé, garantissons les prix. Ce n'est pas parce que les Américains garantissent un prix minimum à leurs céréaliers que leur pays n'est pas une grande nation libérale. Je ne demande même pas cela. Mais, simplement, une égalité des conditions de concurrence entre l'Europe et ses concurrents. On n'a pas le choix.

QUESTION - Sommes-nous autant que le gouvernement le dit sur la même longueur d'onde que l'Allemagne, concernant les questions agricoles ?

LE PRESIDENT - On l'est tellement que le ministre de l'agriculture Bruno Le Maire sera prochainement invité à un conseil des ministres de l'Allemagne pour aborder notamment ces sujets.

QUESTION - Certains parlent de points de TVA pour financer les politiques européennes.

LE PRESIDENT - Sur la TVA, je ne serais pas opposé à ce que, sur quelques produits, on puisse expérimenter une augmentation du prix payé par le consommateur en échange d'une augmentation du prix payé au producteur. Cela pose de difficiles problèmes de répartition de cette taxe au regard des règles européennes, mais nous l'avons fait pour le poisson et cela ne fonctionne pas si mal. Je suis prêt à l'étudier pour certaines productions agricoles.

QUESTION - Pour quels produits ?

LE PRESIDENT - Je pense aux fruits et légumes, si les accords de réduction de marge ne suffisaient pas.

QUESTION - Les négociations à l'OMC achoppent souvent sur l'agriculture. Est-ce que cela ne va pas vous empêcher d'instituer une préférence communautaire renouvelée comme vous le souhaitez ?

LE PRESIDENT - L'Europe doit savoir se défendre. À quoi sert-il d'imposer aux éleveurs français des règles de bien-être animal si nous continuons à importer de la viande de pays qui ne respectent aucune des règles du bien-être animal ? À quoi sert-il d'imposer aux agriculteurs français et européens des règles environnementales si nous continuons à importer en franchise de toute taxe des produits de pays qui ne s'imposent aucune règle environnementale. À quoi sert-il d'imposer à nos éleveurs la traçabilité pour les animaux si on importe des viandes qui ne répondent à aucune de nos normes ? C'est cela la préférence communautaire.

QUESTION - Alors pourquoi interdit-on les OGM ?

LE PRESIDENT - Pour l'instant on n'interdit pas les OGM en général. Seul le Monsanto 810 a été interdit. Il y a des études qui sont en cours. On en attend les résultats tout en appliquant le principe de précaution, notamment en ce qui concerne les risques de dissémination en plein champ. Il n'est quand même pas absurde que je souhaite avoir des rapports précis sur l'impact des OGM. On critique beaucoup le principe de précaution mais il a du sens. Prenons le cas du nuage volcanique qui s'est étendu sur l'Europe. Imaginez qu'aucune précaution n'ait été prise et que nous ayons eu un crash d'avion. Je pense que tous ceux qui ont dénoncé le principe de précaution n'auraient pas été lents à dénoncer l'irresponsabilité des pouvoirs publics.

QUESTION - Cependant, vous-même, sur le plan personnel, êtes-vous plutôt favorable à ce type de technologie ou plutôt réservé ?

LE PRESIDENT - Si vous aviez le moindre doute sur mon intérêt pour les technologies innovantes, intéressez-vous au grand emprunt. J'ai veillé personnellement à ce qu'il y ait 1,350 milliard d'euros sur les biotechnologies. Est-ce que cela ne répond pas à votre question ? Et 150 millions d'euros investis dans Limagrain, est-ce que cela ne répond pas aussi à votre question ? Ce qu'il faut dire, aussi, et notamment au monde agricole, c'est que nous avons la meilleure recherche fondamentale du monde pour développer les biotechnologies du blé. L'Inra est le premier institut à avoir séquencé la totalité du génome du blé.

QUESTION - Il faut pour vous que l'agriculture utilise tous les outils de modernisation ?

LE PRESIDENT - Évidemment ! La clé, pour l'agriculture c'est la modernisation. Mais en même temps, j'ai des responsabilités plus larges, concernant la santé des Français par exemple, ou au regard de mes engagements européens. Voyez ce qui s'est passé en Bretagne, du fait du non respect d'un certain nombre de règles européennes sur l'environnement. Voyez ce que cela coûte aujourd'hui de réparer les dégâts. Sortons du débat entre les innovateurs et les obscurantistes ! Entre les deux j'ai choisi la voie du pragmatisme. Et puis, l'investissement dans l'agriculture française, ce n'est pas seulement les OGM. C'est aussi la qualité, la plus forte valeur ajoutée, les appellations contrôlées. Je me battrai pour qu'on protège les appellations contrôlées. Au fond, qu'est-ce que c'est qu'une appellation contrôlée ? De la qualité et de la plus-value sur le produit qui est fabriqué.

QUESTION - Un autre domaine souffre d'un débat concernant ses intérêts économiques et écologiques, c'est celui des biocarburants. Vous y croyez et désirez les soutenir ou non ?

LE PRESIDENT - Je crois à la possibilité pour les agriculteurs d'avoir des productions diversifiées. Je crois, en agriculture, à la pluriactivité. Cela veut dire : une production agricole principale et une partie de la production consacrée aux biocarburants, de même, que, quand cela est possible, au tourisme, aux chambres d'hôte, etc. Pour les biocarburants, nous n'avons pas renoncé à nos objectifs, notamment de 7 % de part dans la consommation de carburant en 2010. En termes de soutien, ils nous coûtent 900 millions d'euros par an. Cela ne veut pas dire qu'on demande aux exploitations agricoles de se convertir complètement aux biocarburants ! Mais l'objectif fixé est ambitieux. En même temps, je souhaite qu'on travaille sur les biocarburants de seconde génération.

QUESTION - En ce qui concerne les retraites, dont la réforme est en préparation, les retraites agricoles pourront-elles à cette occasion rejoindre celles du régime général. L'autonomie du régime agricole est-elle en jeu ?

LE PRESIDENT - Sur les retraites agricoles, j'ai tenu scrupuleusement mon engagement. En trois ans nous avons augmenté de 15 % le minimum vieillesse. Cette augmentation concerne beaucoup les agriculteurs. J'avais promis 25 % sur la totalité de mon quinquennat. On le fait au rythme de 5 % par an. Il n'y a pas que cela : la pension de réversion pour les veuves est passée de 55 % à 60 %. Et, enfin, nous avons créé un minimum de pension unique pour les retraites agricoles qui concerne 200 000 retraités.

QUESTION - Et pour l'avenir ?

LE PRESIDENT - A la demande de Jean-Michel Lemétayer, j'ai veillé à ce que le syndicalisme agricole soit consulté en tant que tel sur la question des retraites.

QUESTION - Vous estimez que le régime agricole doit se fondre dans le régime général ?

LE PRESIDENT - Chaque régime peut conserver ses spécificités, mais dans une approche commune. Ainsi de la pénibilité du travail. S'il y a un secteur qui connaît ce qu'est la pénibilité du travail c'est le secteur agricole.

QUESTION - Angela Merkel a, récemment, en des termes très chaleureux, soutenu son secteur viticole. En France, la filière viticole a plutôt l'impression qu'on lui met des bâtons dans les roues pour communiquer et s'exprimer sur les chaînes de télévision par exemple. Le carcan anti-alcool n'est-il pas trop contraignant ?

LE PRESIDENT - Il y a un problème de santé publique qui touche le tabac et l'alcool. Je dois veiller à ce que ces impératifs soient respectés. Ils ont permis de sauver des milliers de personnes et de faire économiser beaucoup d'argent à la sécurité sociale. Je ne reviendrai pas sur ces impératifs. Ceci dit la filière viticole doit être soutenue et encouragée. Et c'est du reste pour cela que nous avons autorisé la publicité du vin sur internet.

QUESTION - Vous êtes un citadin, sans attache agricole particulière. Qu'est-ce qui vous intéresse dans le monde agricole.

LE PRESIDENT - Ce qui me plaît chez les agriculteurs, c'est que ce sont des gens qui aiment leur travail. J'adhère à la valeur travail et je la respecte. Ce sont des femmes et des hommes qui ne demandent rien. Qui veulent qu'on les laisse vivre du produit de leur travail. Ils sont libres, notamment de travailler plus que les autres, et ils veulent que cela dure. Ils ne se plaignent pas. Si d'autres catégories avaient perdu, comme eux, 50 % de leur revenu sur un an, que ne se serait-il pas passé ! Je respecte les agriculteurs parce qu'ils sont durs au mal. Leurs valeurs sont des valeurs que je comprends parce que je les partage. C'est aussi un milieu que j'apprécie parce qu'il est franc et dit ce qu'il pense. C'est enfin un métier dans l'avenir duquel je crois. Les agriculteurs me disent : aidez-nous à vivre de notre travail. J'ai été élu pour les aider. Chaque jour je le fais. Ma détermination est totale.

 

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29 avril 2010 4 29 /04 /avril /2010 07:32

 

http://www.gsk.fr/avenirdelasante/historique/2009/visuel/temoins/Elisabeth%20HUBERT.jpgMadame la Ministre,

La médecine de proximité est un service essentiel pour nos concitoyens. Elle constitue le premier éléments de la chaîne de soins. Elle se situe à la fois en amont et en aval de l'hôpital dont la vocation est de prendre en charge les situations les plus complexes.

Les médecins libéraux, généralistes et spécialistes, constituent le coeur de la médecine de proximité. Leur engagement à accomplir chaque jour et sans relâche leur mission - soigner, soulager, accompagner - leur dévouement au service de leurs patients, méritent la considération et la reconnaissance de la société tout entière.

La médecine de proximité repose aussi sur des professionnels paramédicaux qui assurent certains actes de premier recours ainsi que des centres de santé qui salarient des médecins.

Sous toutes ses formes, la médecine de proximté est confrontée aujourd'hui à des difficultés structurelles. Au premier rang de celles-ci, il faut citer l'évolution attendue de la démographie médicale. Le nombre de médecins pour 100 000 habitants, qui étaient de 290 début 2009, pourrrait atteindre 275 en 2020, soit le niveau du début des années 1980. La baisse, qui a débuté, de la densité médicale et le non remplacement de médecins libéraux qui cessent leur activité suscitent des inquiétudes légitimes dans la population, particulièrement dans les territoires ruraux et dans les quartiers de la politique de la ville.

Au-delà des données quantitatives, l'exercice de la médecine a profondément changé. La médecine est devenues hyperspécialisée, ce qui rend sa pratique plus ardue pour le médecin généraliste. Il est devenu plus difficile d'exercer seul pour répondre aux besoins de santé d'une population vieillissante. Les tâches autres que médicales, comme la gestion ou la bureautique, ont pris de l'importance. Les contrôles de l'assurance maladie sont plus fréquents. Et l'évolution de la carrière est un sujet de préoccupation pour nombre de médecins libréaux [...]

 

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28 avril 2010 3 28 /04 /avril /2010 16:44

 

http://www.lepoint.fr/content/system/media/1/201004/93780_une-sarko-jintao.jpg

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28 avril 2010 3 28 /04 /avril /2010 11:36

 

 

 

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28 avril 2010 3 28 /04 /avril /2010 10:27

http://media.senat.fr/VOD/gouvernement/2009/DG20090527-02-jeunes-demuynck.jpgChristian DEMUYNCK, sénateur de Seine-Saint-Denis, rapporteur de la proposition de loi, continue de promouvoir le service civique auprès des jeunes et entame un Tour de France pour présenter ce dispositif ambitieux.
 
« Mon objectif est de mobiliser au maximum la jeunesse française et leur donner envie de s’engager dans un vrai projet citoyen. A quelques semaines de la publication des décrets d’application, nous ne devons pas relâcher nos efforts ; notre ambition est grande, nous nous sommes fixés 10 000 jeunes volontaires pour l’année. »
 
Son premier rendez-vous a eu lieu le lundi 22 mars au lycée professionnel et technique Jean-Baptiste CLEMENT de Gagny (Seine-Saint-Denis). Il a poursuivi le mardi 30 mars au lycée Charles de Gaulle à Rosny-sous-Bois et au café « Le Sorbon » à Paris (5ème arrondissement).
 
Les prochaines dates :
Plusieurs dates sont déjà programmées en province. Le 6 mai à Clermont-Ferrand et le 5 juin à Gordes (en Lubéron).
 
« Ces rencontres vont être l’occasion de présenter le dispositif et de répondre aux questions des jeunes. Le Gouvernement s’est pleinement engagé avec 40 millions d’euros votés dans le projet de loi de finances 2010 et 1.5 millions d’euros consacrés au niveau national, en lien avec les structures d’accueil pour la formation civique et citoyenne des volontaires. »
 
Pour sa part, en tant que Maire de Neuilly-Plaisance, Christian DEMUYNCK a lancé un appel à candidatures sur le site Internet de la ville, www.mairie-neuillyplaisance.com à l’attention de tous les jeunes désireux de mettre leur énergie ainsi que leur talent au profit des Nocéens. 
 
« Le service civique doit devenir une étape indispensable dans la vie du jeune. Il a vocation à rassembler et à transcender les clivages pour mettre le cap vers la mixité sociale, en améliorant l’intégration républicaine et le développement de la cohésion nationale.  C’est le message que je ferai passer au cours de ce Tour de France.»

Le sénateur Christian Demuynck sera à Lorient le 22 juin prochain à 19h pour nous exposer les grandes lignes du service civique.

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27 avril 2010 2 27 /04 /avril /2010 13:05

http://jeunessarkozystes.fr/files/2010/04/article-libe.jpg

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27 avril 2010 2 27 /04 /avril /2010 13:01

 

http://img40.xooimage.com/files/d/7/4/sarkozy-thibault_2-c57c1-15d8862.jpgAprès l'entretien qu'il a eu vendredi après-midi avec M. Jean-Claude MAILLY, secrétaire général de Force Ouvrière, le Président de la République a reçu aujourd'hui à 18 heures M. Bernard THIBAULT, secrétaire général de la CGT.

Cette rencontre, qui s'inscrit dans le cadre des entretiens bilatéraux que le Président de la République a régulièrement avec les dirigeants des organisations syndicales et patronales, a permis d'évoquer les principaux sujets sociaux afin de préparer la rencontre que le chef de l'Etat organisera prochainement sur l'emploi avec les partenaires sociaux.

M. Bernard THIBAULT a fait part au Président de la République de la position de son organisation concernant la réforme des retraites, l'emploi, les difficultés des salariés en situation irrégulière, les questions industrielles et le pouvoir d'achat.

Le chef de l'Etat a indiqué qu'il souhaitait que, sur l'ensemble de ces sujets, les propositions des organisations syndicales et patronales fassent l'objet d'un examen approfondi, en concertation étroite avec les ministres concernés.

 

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26 avril 2010 1 26 /04 /avril /2010 15:33

 

http://photo.lejdd.fr/media/images/politique/sarkozy-barroso-elysee/1365893-1-fre-FR/Sarkozy-Barroso-Elysee_pics_809.jpgLe Président de la République a reçu aujourd'hui à l'Elysée le président de la Commission européenne, M. José Manuel BARROSO, pour un déjeuner de travail. Ils ont fait à cette occasion un tour d'horizon des principales échéances européennes et internationales.

Nicolas SARKOZY et José Manuel BARROSO ont notamment constaté leur accord sur la nécessité d'une action rapide et résolue contre la spéculation qui vise la Grèce afin d'assurer la stabilité de la zone euro. Il en va de même s'agissant de l'importance d'une stratégie économique européenne ambitieuse basée sur un véritable Gouvernement économique européen.

Le Président de la République a insisté sur la nécessité pour l'Europe de défendre plus résolument ses intérêts dans le monde, dans les discussions commerciales comme dans les négociations en cours à la suite de la conférence de Copenhague, y compris en travaillant sérieusement à l'option d'un mécanisme d'ajustement aux frontières. Enfin, le chef de l'Etat a souligné son engagement personnel pour le maintien d'une agriculture européenne forte et vivante s'appuyant sur une politique agricole commune renouvelée

 

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23 avril 2010 5 23 /04 /avril /2010 22:16

http://referentiel.nouvelobs.com/file/284958.jpgDans le cadre des contacts réguliers qu'il entretient avec les dirigeants des principales organisations syndicales et patronales, le Président de la République a reçu aujourd'hui à 17 heures M. Jean-Claude MAILLY, Secrétaire général de Force Ouvrière.

Cet entretien a été l'occasion d'un tour d'horizon des principaux sujets sociaux, dans la perspective de la réunion que le Président de la République organisera prochainement sur l'emploi avec les partenaires sociaux.

M. Jean-Claude MAILLY a notamment fait part au chef de l'Etat de sa satisfaction concernant l'accord conclu le 15 avril entre les partenaires sociaux et le Gouvernement pour apporter des réponses aux demandeurs d'emploi arrivant au terme de leurs droits à l'assurance chômage.

M. Jean-Claude MAILLY a également rappelé au Président de la République la position et la détermination de son organisation sur la réforme des retraites, dans le prolongement de la concertation que M. Eric WOERTH a engagée avec les partenaires sociaux le 12 avril. Ont également été évoquées les questions d'emploi et de pouvoir d'achat.

A l'occasion de cette rencontre, le chef de l'Etat a réaffirmé son attachement à ce que la concertation avec les organisations syndicales et patronales soit, sur tous les sujets, la plus approfondie possible.

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22 avril 2010 4 22 /04 /avril /2010 16:27

 

 

 

http://www.elysee.fr/president/root/bank_objects/T6-chambery0003.jpg

DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Commémoration du 150ème anniversaire 
du rattachement de la Savoie à la France

Chambéry -- Jeudi 22 avril 2010

 


Messieurs les Ministres, 
Monsieur le Président du Conseil Régional, 
Messieurs les Présidents des Conseils Généraux de la Savoie et de la Haute Savoie, 
Mesdames et Messieurs les Parlementaires, 
Madame le Maire de Chambéry, 
Mesdames et Messieurs,

 


Il y a 150 ans, la Savoie et Nice s'unissaient à la France. Cette union ne fut pas, comme si souvent dans l'histoire, le fruit ni d'un héritage dynastique ni d'une guerre de conquête.

Deux peuples qui se connaissaient, qui se comprenaient, qui se respectaient, qui s'aimaient, décidèrent de former une seule nation. La géographie, la langue, le sentiment, la raison les poussèrent dans les bras l'un de l'autre.

Quand le Piémont voulut unir l'Italie, la Savoie et Nice se sentirent à l'écart de ce grand projet. Elles se souvinrent alors qu'elles avaient été françaises et aspirèrent à le redevenir. La Savoie qui n'avait pas été conquise par la Révolution mais qui s'était donnée à elle par amour de la liberté, ne pouvait oublier son sang versé sur tous les champs de batailles de la République et de l'Empire. De ces victoires et de ces défaites qui avaient été aussi les siennes, de ces joies et de ces peines partagées durant 23 ans, elle avait gardé une nostalgie que rien n'avait pu arracher du cœur de tous les Savoyards.

Département français, la Savoie l'avait été parce qu'elle l'avait voulu, parce qu'elle l'avait librement choisi. Elle avait servi sa patrie d'adoption avec enthousiasme et avec une fidélité sans faille. Même aux heures les plus sombres, elle ne l'avait jamais abandonnée, jamais trahie, jamais reniée.

Elle s'était sentie bien dans la France.

Waterloo et le Congrès de Vienne l'avaient arrachée à sa nouvelle patrie sans que le peuple savoyard fût consulté. 
Aussi, quand l'histoire lui permit de choisir à nouveau son destin, elle n'hésita pas.

Certes, la réunion de la Savoie et de Nice à la France fut d'abord une affaire diplomatique. Ce fut le prix que le Piémont consentit à payer à la France pour son soutien à sa politique italienne. Ce fut le prix du sang français versé à Magenta et à Solferino pour l'unité de l'Italie.

Le 2 avril 1860, Victor Emmanuel II, Roi de Piémont-Sardaigne, déclara : « Par reconnaissance pour la France, pour le bonheur de l'Italie, pour consolider l'union des deux Nations qui ont entre elles des communautés d'origines, de principes et de destinées, il y avait un sacrifice à faire ; j'ai fait celui qui coûtait le plus à mon cœur... » 
Mais c'est en définitive le peuple savoyard qui choisira son destin en approuvant à la quasi unanimité le rattachement de la Savoie à la Nation française par 136 566 voix sur 137 189 votants.

En 1860, les Savoyards se sont sentis français, confirmant par ce vote massif le choix qu'ils avaient déjà fait en 1792.

Ils n'ont cessé depuis lors de manifester leur attachement à la patrie qu'ils se sont choisie.

Si, comme on l'a dit, « la Nation française est un plébiscite de tous les jours », ce sont les Savoyards qui ont depuis 150 ans le mieux illustré cette formule.

Car c'est ici, dans cette Province, dernière venue dans la communauté nationale, que s'est manifesté, à chaque fois que les circonstances l'ont exigé, le plus ardent patriotisme français.

Qui pourra oublier le sacrifice héroïque des soldats et des francs-tireurs savoyards en 1870 ?

Qui pourra oublier les blessés, les mutilés, les morts couchés dans la boue des tranchés de la Grande Guerre à laquelle la Savoie paya un si lourd tribut.

Qui pourra oublier la résistance savoyarde, les maquis, les héros des Glières, les habitants des villages qui ravitaillaient, informaient, cachaient les partisans au péril de leur vie ?

Qui pourra oublier ces hommes courageux, ces femmes admirables, qui ont si bien incarné les vertus d'un peuple qui, en luttant depuis des millénaires avec la montagne et le climat, s'était forgé un caractère hors du commun ?

On a dit que c'était la neige qui en conservant les traces avait mené les Allemands jusqu'aux combattants des Glières. La nature savoyarde est souvent rude, impitoyable, éprouvante. Elle tend des pièges. Mais son austère grandeur tire les âmes vers le haut.

Aux Glières, il n'y avait pas que des Savoyards de souche. Mais tous communiaient dans le même esprit de sacrifice au milieu de ce décor grandiose qui semblait destiné de toute éternité à servir de cadre à la tragédie.

La tragédie a besoin de la grandeur.

Elle l'a trouva sur ce plateau sauvage où soufflait tout l'esprit de la Savoie.

L'esprit de la Savoie n'était pas que dans le décor. Il était aussi dans l'âme des Chasseurs Alpins qui a tant irrigué la résistance savoyarde et qui était si présente aux Glières.

Les traditions de cette arme d'élite magnifient les vertus savoyardes. Ses pages de gloire sont la gloire de la Savoie, même si tous les Chasseurs Alpins ne sont pas Savoyards. Elles sont la gloire de la France.

Je veux rendre hommage à ces combattants héroïques qui se sont tant battus pour notre pays dans toutes les batailles où son sort s'est joué.

Les troupes de montagne ont été engagées au Liban, au Tchad, en Côte d'Ivoire, au Kossovo, en Bosnie-Herzégovine, en Afghanistan...Partout où elles sont présentes, elles défendent nos valeurs. Je ne peux avoir ici qu'une pensée particulière pour le 13ème bataillon de Chasseurs Alpins de Chambéry dont 500 hommes sont engagés en Afghanistan et dont le comportement dans un contexte si difficile et si dangereux fait honneur à la France et à son armée comme il leur a toujours fait honneur au cours de son histoire.

Depuis 150 ans, c'est en étant fidèle à elle-même que la Savoie a été si profondément française.

Les Savoyards qui ont émigré jadis, si nombreux, hors de la Savoie, ont emporté avec eux les vertus que leur avaient transmises leurs aïeux. Elles étaient si fortes qu'ils n'ont pu les oublier et qu'ils les ont transmises à leur tour, intactes, à leurs enfants, engendrant en France, en Europe et dans le monde des générations d'entrepreneurs obstinés, de travailleurs courageux, de soldats, de fonctionnaires pénétrés de leurs devoirs.

Ceux qui sont venus en Savoie, qui n'y étaient pas nés ont été comme happés par sa personnalité si forte. Ils se sont imprégnés à leur tour de ses vertus, de son caractère.

Il y a une puissance assimilatrice de la Savoie qui vient de la nature et de la culture.

Le peuple savoyard est un très vieux peuple qui, depuis la préhistoire, n'a cessé de se mélanger, de se métisser, mais qui s'est très tôt forgé une unité, une identité. Depuis le premier comte de Savoie jusqu'à la réunion du duché de Savoie à la France, sept siècles se sont écoulés.

La France, c'est une multitude de petites patries qui se sont rassemblées pour en former une grande, mais qui ont gardé leur caractère et le souvenir de leur ancienne individualité. Derrière le centralisme et l'uniformité administrative, c'est la diversité qui depuis toujours domine. L'exode rural, les révolutions industrielles, les guerres, les immigrations, ont depuis longtemps mélangé les populations des vieilles provinces françaises sans les faire disparaître : elles vivent à l'intérieur de la culture et de l'identité françaises et chaque nouvel apport ajoute à cette richesse.

Et de toutes les provinces françaises la Savoie est l'une de celles qui se sont senties d'emblée les plus françaises sans rien renier de leur caractère propre, en ne cessant jamais d'affirmer leur personnalité.

La Savoie donne tous les jours la preuve que l'on peut être pleinement français et attaché à ses racines, que l'on peut être ouvert tout en s'efforçant de rester soi-même, que l'on peut être fidèle à son histoire et tourné vers l'avenir.

C'est par la valeur du travail et de l'effort, c'est par son esprit d'entreprise que la Savoie a arraché à la nature sa prospérité.

Considérons la réussite de la Savoie : elle est remarquable. La qualité de sa production agricole, son savoir-faire industriel, son succès touristique lui permettent de regarder l'avenir avec confiance. Elle a su tirer le meilleur parti de toutes ses ressources. De ses handicaps, elle a su faire une force. D'une nature rude, elle a su faire un atout. A l'origine de cette réussite, il n'y a rien d'autre ici que le génie d'un peuple, ses vertus foncières, son courage, son intelligence, son ouverture d'esprit, sa rigueur, son obstination.

Là où elle est placée, avec ce qu'elle a accompli depuis un siècle et demi, avec ce qu'elle a su préserver de son authenticité, la Savoie possède tous les moyens de sa réussite future. Mais si les succès sont remarquables, rien pour autant n'est acquis.

La réussite de la Savoie s'inscrit dans celle des grandes politiques nationales qui ont dans le passé associé efficacement l'initiative publique et l'initiative privée.

Dans les infrastructures, l'aménagement du territoire, le tourisme, l'agriculture, la politique industrielle, l'impulsion publique a été décisive. Elle le sera encore dans l'avenir.

La Savoie a besoin de nouvelles infrastructures, d'une énergie pas trop chère, d'une rénovation de son offre touristique, d'un renouvellement de sa base industrielle ébranlée par la mondialisation et par la crise, d'un effort de recherche qui lui permette de prendre une avance technologique des domaines de pointe où elle a tout pour réussir.

Elle a besoin d'une politique d'aménagement transfrontalière qui lui permette de tirer le meilleur parti de sa situation.

La candidature d'Annecy aux Jeux Olympiques est le symbole de cette volonté collective de se projeter dans l'avenir et de construire un nouveau modèle de développement pour le XXIe siècle. 
L'État mettra tout en œuvre, soyez-en sûrs, pour qu'Annecy soit choisie. 
Je veux dire aussi que, s'agissant de cette grande infrastructure d'avenir qu'est la liaison Lyon-Turin, tout sera fait pour que le calendrier prévu, sur lequel l'Italie et la France se sont mises d'accord, soit respecté.

Je sais que les deux départements de la Savoie réfléchissent à la possibilité de se réunir en un seul pour regrouper les moyens et rendre à la Savoie son ancienne unité administrative. Je ne peux que me réjouir de cette évolution qui dans le cadre de la réforme à venir permettra d'adapter notre organisation territoriale aux besoins et aux réalités locales qui ne sont pas forcément les mêmes dans chaque région.

Il y a dans la Savoie comme un condensé de France.

D'une France qui veut rester un creuset de valeurs fortes, d'une France qui a le goût de la liberté, la passion de l'égalité, le sens de la fraternité.

D'une France qui est l'héritière de vingt siècles d'histoire, de vingt siècles de civilisation et qui en est fière.

D'une France qui ne veut pas voir disparaître tous ses villages, tous ses clochers, toutes ses usines, toutes ses fermes parce qu'ils font partie de son identité.

La Savoie a ses villages, semblables à tous les villages de France avec leurs clochers, leurs monuments aux morts où sont gravés tant de noms. Elle a ses lieux de mémoire. Elle a ses usines, ses champs, ses pâturages. Elle, qui a su faire vivre ses vallées industrieuses, ses appellations d'origine contrôlées, son immense domaine skiable, elle sait que pour vivre elle a besoin de l'équilibre de toutes ses parties, qu'elle a besoin de ses ouvriers, de ses paysans, que s'ils partaient tous, si elle abandonnait des pans entiers de son territoire, elle y perdrait son âme, sa culture, sa richesse.

Une partie de l'avenir de la France se joue dans les montagnes et les vallées de la Savoie. Dans la mécanique de précision, dans le décolletage, dans l'agriculture de montagne, dans les sports d'hiver, la Savoie a acquis toute seule une réputation mondiale. La capacité de la France à préserver cette réputation, à la valoriser, est un enjeu majeur pour notre pays.

La Savoie doit être le laboratoire d'un nouveau modèle de développement, d'un nouvel équilibre entre l'homme et la nature mais n'en faisons pas une réserve d'où l'homme serait exclu, où il n'y aurait plus d'activité humaine.

La grande réussite de la Savoie c'est d'avoir su faire vivre la montagne, c'est d'avoir mis de la vie dans les vallées les plus reculées, c'est d'avoir construit des villes, des villages, des routes, des ponts, des barrages, des usines, des stations de sport d'hiver.... sans que la Savoie soit défigurée comme l'ont été tant d'autres régions dans le monde et même en France.

La grande réussite de la Savoie, c'est d'avoir enraciné des emplois dans la montagne, dans les vallées.

La grande réussite de la Savoie, c'est qu'elle produit, c'est qu'elle crée, c'est qu'elle vit.

Il y a des progrès à faire en matière de développement durable, de protection de l'environnement et de la biodiversité. Il faut préserver ce patrimoine exceptionnel que sont les Alpes mais nous devons trouver un équilibre pour qu'elles continuent à vivre, pour que des familles continuent de s'y installer, de s'y enraciner.

Nous ne commémorons pas aujourd'hui ce 150e anniversaire de la réunion de la Savoie et de la France pour nous enfermer dans le passé.

Si beaucoup de Savoyards d'aujourd'hui ne sont pas nés en Savoie, si beaucoup d'autres sont les enfants des immigrés italiens, espagnols, portugais, polonais, algériens qui, tout au long du XXe siècle sont venus apporter à la France le renfort de leurs bras et de leur cœur, cette histoire est quand même la leur parce qu'elle n'est pas seulement celle des Savoyards de vielles souches. Elle est l'histoire de tous les Français car la première chose que l'on partage dans une Nation, c'est une histoire commune.

Et dans le souvenir émouvant de cette union qui donna à la France son visage définitif, dans l'histoire de cette province si tardivement rattachée, il y a l'histoire de tous ceux qui ont un jour décidé de devenir Français et de prendre en partage l'histoire, la culture, les lois, les idéaux de la France.

La commémoration de la réunion à la France de la Savoie et de Nice c'est celle de notre unité nationale et des valeurs qui la fondent : le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, l'égalité des droits et des devoirs, l'égalité des chances, la reconnaissance du mérite, le patriotisme...

L'histoire de la Savoie est exemplaire puisque dix ans à peine après le rattachement les soldats se battent dans la guerre de 1870 avec une ardeur sans égale.

L'histoire économique est aussi édifiante. Faisant figure de départements sous-développés en 1860, la Savoie et la Haute-Savoie se classent un siècle plus tard respectivement au 8ème et au 6ème rang des départements français pour le niveau de vie. En quelques décennies d'efforts et de travail l'image du « petit ramoneur savoyard » a disparu. De péjoratif « savoyard » est devenu synonyme de grande vertu.

Louis Armand parlant pour la Savoie lors des cérémonies du 100ème anniversaire disait qu'il avait fallu deux conditions pour que ce miracle s'accomplisse : la première fut l'entrée de la Savoie dans l'économie française. La seconde fut la qualité des hommes qui ne sont pas restés passifs.

Ce que la Savoie a accompli c'est en quelque sorte l'idéal que notre République s'assigne pour chaque Français et pour chaque région française.

Pourquoi l'intégration de la Savoie a-t-elle si bien réussi malgré les handicaps du départ ? Parce que la France a su se montrer accueillante mais aussi parce que les Savoyards se sont donnés du mal.

Nous sommes ici dans une région où depuis toujours l'on travaille et l'on se bat sans rien demander, où l'on trouve normal de faire son devoir, où l'on a des valeurs.

Les Savoyards ont apporté à la France un état d'esprit que l'on aimerait parfois voir plus répandu et dont l'on a pu mesurer la grandeur dans les épreuves.

Il y a dans l'intégration de la Savoie à la Nation une valeur d'exemple qui ne doit pas nourrir je ne sais quelle nostalgie mais qui doit être une valeur pour le présent et pour l'avenir.

Il y a dans l'intégration de la Savoie à la Nation une leçon à tirer pour chacun d'entre nous sur la signification que nous donnons à la France et sur ce que nous voulons en faire.

Si les Savoyards, comme les Niçois, ont tant voulu devenir Français, eux qui formaient au cœur de l'Europe une si vieille nation, c'est parce qu'ils y ont reconnu leur intérêt mais aussi leur idéal. Au chant des Allobroges, ce chant de liberté pour tous les peuples opprimés que chantaient tous les Savoyards, seule la France, à leurs yeux, pouvait répondre parce qu'elle leur offrait l'espérance de demeurer à jamais des hommes libres.

Michelet a dit joliment « Les provinces françaises se sont comprises, se sont aimées ». Si nous voulons transmettre à nos enfants la France que nous avons reçue en héritage, si nous voulons pouvoir continuer de défendre notre liberté, notre langue, notre culture dans le monde, nous devons continuer cet effort multiséculaire pour nous comprendre les uns les autres et nous aimer assez pour rester unis. Car la France, si prompte à se diviser, n'est forte, nous le savons tous, que lorsqu'elle est rassemblée. 
Ayons confiance dans notre pays, dans ce qu'il peut accomplir, soyons fiers de lui, de ses valeurs, c'est un grand et beau pays.

Vive la Savoie, 
Vive la République et 
Vive la France !

 

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